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Depuis sa naissance au Gabon, en 1998, Sab essuie des vents contraires. Sa situation illustre la misère des migrants qui imaginent qu’en France, avec de la chance, ils trouveront un travail qui les fera vivre. Grâce à son avocate, il a échappé au pire. Mais pour combien de temps ?

Devant la 17e chambre correctionnelle de Bobigny (Seine-Saint-Denis), Sab comparaît détenu. Arrêté le 7 avril à Noisy-le-Sec, il n’a pas pu être jugé à l’issue de sa garde à vue, faute d’interprète. Il a donc dormi dans un lit et mangé à sa faim durant 21 jours. Aux sans-abris, parfois, la prison redonne un peu de forces.

Ainsi, vendredi 30 avril, affronte-t-il courageusement ses juges, bien qu’il se sache en péril : en situation irrégulière, Sab est prévenu de détention de tabac manufacturé sans autorisation et de violence envers deux policiers. Son avocate, Me Saïma Rasool, a beau dire que « c’est un bon petit gars », l’affaire est mal engagée.

Je mène l’instruction comme je veux !

En survêtement à bandes rose fluo sous un anorak vert pâle, petites tresses dressées sur la tête, Sab se tient droit et n’esquive aucune question. Oui, il est entré en France illégalement, il y a deux ans. Oui, il avait 63 paquets de cigarettes dans son sac à dos. Oui, il a fui devant les policiers qui l’ont vite maîtrisé au moyen de deux décharges de Taser. Non, il ne les pas frappés à la mâchoire et à l’œil. Pas plus qu’il n’a tenté de les mordre ou ne leur a craché au visage, comme ils le prétendent.

Les victimes, absentes, ne sont même pas représentées. Aussi le président Jean Corbu s’en fait-il le porte-parole, détaillant les blessures (un à quatre jours d’ITT), énumérant leurs griefs, s’emportant tellement qu’il en oublie l’interprète, incapable de restituer simultanément le flux continu de mots. A tel point que Me Rasool se dresse, appelle le juge à la patience. « Je mène l’instruction comme je veux ! », rétorque-t-il sèchement. Soudain glaciale, l’atmosphère fige le traducteur qui bégaie en dialecte fang.

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